La
Bonne Mère de Marseille, les effigies de Notre Dame de la Garde
Affiche
de l’exposition
La
Bonne Mère de Marseille, effigies de Notre Dame de la Garde
Couverture
du livre
Dimanche
17 février, à 11h30, aura lieu au musée de Notre-Dame-de-la-Garde le vernissage
d’une exposition dont je suis l’un des commissaires et la présentation du livre
qui l’accompagne : La Bonne Mère de Marseille, les effigies de Notre
Dame de la Garde. Dans les deux cas, il s’agit d’évoquer les différentes
statues portant le vocable de Notre Dame de la Garde. C’est l’occasion pour moi
de revenir aujourd’hui sur le concours qui a opposé trois grands artistes pour l’érection
de la Vierge monumentale du clocher.
Le 7
janvier 1866, comme l’on annonce la fin du chantier dudit clocher dans le
courant de l’année, un concours restreint est ouvert entre trois sculpteurs
parisiens : Eugène Lequesne (1815-1887 ; prix de Rome en 1843), Aimé Millet (Paris 1819-1891) et Charles Gumery (1827-1871 ; prix de Rome en
1850). Leurs maquettes en plâtre sont alors exposées au Musée pendant dix jours
pour être soumises au public tandis qu’un jury est constitué et chargé de se
prononcer. Les critères du jugement sont précis : être attentif « au
caractère éminemment religieux et traditionnel de la statue » et
veiller « à la stricte appropriation des lignes et de la silhouette à
toutes les convenances optiques imposées par la composition et la situation du
monument » (Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 34 J 7).
Charles
Gumery, Notre Dame de la Garde, maquette plâtre, 1866
Aimé
Millet, Notre Dame de la Garde, maquette plâtre, 1866
Musée,
Notre-Dame-de-la-Garde © Xavier de Jauréguiberry
Le
jury n’est pas pleinement satisfait des œuvres soumises. Il reproche à l’esquisse
n°1 son manque d’ampleur et son style gothique incohérent avec un bâtiment romano-byzantin.
Il reconnaît à la maquette n°2 une certaine monumentalité mais ne lui trouve
aucun caractère religieux. Il apprécie le projet n°3 pour son sentiment pieux
associé à la convenance de la silhouette aux lignes harmonieuses ; la
statuette n°3 – celle de Lequesne – l’emporte à condition d’y apporter quelques
modifications précisées ultérieurement. La Vierge, d’une grande noblesse, aux
drapés réguliers, n’est pas voilée mais possède en contrepartie une longue
chevelure ondulée qui renouvelle quelque peu l’iconographie mariale. Elle porte
l’Enfant Jésus côté gauche lequel a les bras levés évoquant déjà la croix et
les paumes des mains dirigées vers la terre en signe de bénédiction et de
protection.
Eugène
Lequesne, Notre Dame de la Garde, statuette d’édition en plâtre, vers
1870-1880
Photo,
Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 34 J 119 © Xavier de
Jauréguiberry
Avant toute réalisation, l’architecte Henry
Espérandieu (1829-1874) décide d’ériger un simulacre de la statue à l’aide de
charpentes, de toiles et de plâtre afin d’en déterminer les meilleures
proportions : la statue devra mesurer autour de 9 m. Reste ensuite à
choisir la technique de réalisation la plus appropriée. À l’issue d’une enquête
menée auprès de savants et d’architectes, on choisit le cuivre
galvanoplastique, procédé nouveau mis au point par la maison Christofle. C’est
d’ailleurs à cette manufacture parisienne qu’est confiée, en juin 1867, la
réalisation de la statue définitive. La statue, constituée d’une épaisseur de
cuivre déposée électrolytiquement sur un moulage de gutta-percha, est réalisée
en quatre tronçons de 3 à 8 mm d’épaisseur, chacun étant resté trois ou quatre
mois dans des cuves de 45 000 litres de galvanoplastie.
Anonyme,
Statue monumentale de Notre Dame de la Garde dans les ateliers Christofle,
photographie, 4 octobre 1869
Collection
de la basilique © Xavier de Jauréguiberry
Puis les tronçons, montés sur une
armature, sont acheminés jusqu’à Marseille par chemin de fer. Par une
convention du 4 mars 1870, Christofle garantie la statue jusqu’en 1920.
Celle-ci est enfin dorée par Mathieu Ferrari, puis montée sur le clocher et bénite
par Mgr Place le 24 septembre 1870, jour de la fête de Notre-Dame de la Merci.
Elle aura coûté au total 83 169 francs et sera redorée en 1897, 1936, 1963,
1989 et une nouvelle fois en 2024.
Eugène Lequesne, Notre-Dame de la
Garde, statue, bronze galvanoplastique, 1869
Collection de la basilique © Xavier de
Jauréguiberry