lundi 21 avril 2025

Médaille et insigne de l’Automobile-Club de Marseille (Charles Delanglade sculpteur)

Samedi 26 avril, la maison de ventes rouennaise Sequana et maître Jérôme Drège vont vendre un exemplaire de la plus petite œuvre conçue par Charles Delanglade (1870-1952). Toutefois, elle est mal identifiée dans leur catalogue : présentée comme un insigne de l’automobile-club de Monaco, il s’agit en fait de l’insigne de l’automobile-club de Marseille. Cette vente est l’occasion de revenir sur son histoire.

Lot 4, Lot de trois broches, estimation 10€/20€

Le 12 novembre 1895, est fondé à Paris un club masculin : l’Automobile-Club de France. Dans la foulée naissent des automobile-clubs régionaux. Celui de Marseille voit le jour le 28 février 1899. Dès l’origine, son siège se situe au 170 cours Lieutaud (6e arrondissement), un bâtiment au fronton triangulaire qui abrite encore un parking-garage.
Le sculpteur dandy Charles Delanglade est, dès les débuts de l’Automobile-Club de Marseille l’un de ses membres assidus. C’est donc tout naturellement à lui qu’est confiée la réalisation d’une médaille. L’avers présente une femme, coiffée d’une casquette de chauffeur, conduisant une automobile du type Voiturette Renault de 1898 ; une Arlésienne figurant l’allégorie de la Provence l’accueille avec un bouquet de fleurs. Le revers présente une palme et un bandeau arborant l’inscription L'Automobile-Club de Marseille. Des exemplaires en bronze et en argent sont frappés.

Charles Delanglade, L’Automobile-Club de Marseille, médaille bronze, 1899
Collection personnelle

Charles Delanglade, L’Automobile-Club de Marseille, médaille argent, 1899
Un exemplaire vendu à Monaco (Boule Auctions, lot 830) le 14 novembre 2018

Parallèlement à la réalisation de la médaille, Delanglade crée l’insigne de l’association. La tête d’une femme, de profil gauche, arbore une casquette de chauffeur. Elle se détache sur un volant d’automobile tandis que, sous son buste, le monogramme de l’association (ACM) s’imbrique dans des branches de lauriers. Reproduite dans La Vedette du 23 septembre 1899, cette broche est qualifiée de « ravissant insigne » et de « petit chef-d’œuvre. »

La Vedette, 23 septembre 1899, p.95

Charles Delanglade, L’Automobile-Club de Marseille, insigne en métal, 1899
Collection personnelle

mercredi 16 avril 2025

Les mats d’éclairage de la place de la Préfecture (François Seigneur architecte)

Le journaliste de La Marseillaise David Coquille a récemment attiré l’attention sur le sort malheureux des mats d’éclairage de la place de la Préfecture dans deux articles parus consécutivement les 8 et 10 avril dernier. Œuvres de François Seigneur (1942-2019), ils ont été abattus par la Métropole entre le 30 décembre 2024 et le 10 janvier 2025.

François Seigneur, Mats d’éclairage, place de la Préfecture, 6e arrondissement
© David Coquille

Reliquats desdits mats d’éclairage, avril 2025 © David Coquille

De 1992 à 1995, l’architecte marseillais Alain Amadeo (né le 8 mai 1944) et ses associés aménagent la place de la Préfecture à la suite de la création d’un parking souterrain. Ils créent deux paires de trois bassins en granit de faible profondeur, disposés en cascade et alimentés en continu par les jets d’eau des bassins supérieurs ; ceux-ci reflètent les façades haussmanniennes des bâtiments environnants.
Amadeo sollicite par ailleurs l’architecte-scénographe-plasticien normand François Seigneur pour la mise en lumière de la place. Il conçoit alors quatre mats, hauts de 37 mètres, flexibles pour résister au mistral et dont la base s’éclaire à la tombée de la nuit. Ils évoquent la vocation maritime de la ville et annoncent à la manière des porte-drapeaux le caractère officiel de la préfecture des Bouches-du-Rhône qu’ils devancent. La place et les mats sont solennellement inaugurés le 11 mai 1995.
Seigneur réalise plusieurs dessins préparatoires et études techniques pour la conception de ces mats, parfois présentés comme des antennes. On trouve aujourd’hui ces documents à Paris, à la Cité de l’architecture et du patrimoine.

François Seigneur, Mats d’éclairage, ensemble de documents techniques, 1993-1995
© Fonds Seigneur. SIAF/Cité de l’architecture et du patrimoine/Archives d’architecture contemporaines

La Métropole justifie l’abattage immédiat de ces mats, pourtant situés dans un périmètre protégé par les Monuments historiques, par leur état de corrosion avancée. Aucune étude n’a été lancée pour leur sauvegarde. Pire, leur sort semblait scellé depuis longtemps ! En effet, les visuels du futur (et inutile) tramway des Catalans les avaient déjà supprimés. On aurait pu les restaurer et les réinstaller à un autre emplacement plutôt que de les sacrifier purement et simplement !

lundi 7 avril 2025

Le Génie de la mer (Carlo Sarrabezolles sculpteur)

En 1934, la Compagnie Générale Transatlantique et l’architecte arcachonnais Roger-Henri Expert (1882-1955) aménage le pont-promenade du paquebot Normandie. Ils commandent au sculpteur toulousain Carlo Sarrabezoles (1888-1971) une statue monumentale en bronze – Le Génie de la mer – pour décorer la plage arrière du liner. L’artiste réalise de nombreux croquis et maquettes pour ce projet [1].

Carlo Sarrabezolles, Trois études pour Le Génie de la mer
Stylo à bille à encre bleue sur papier, 21 cm x 13,5 cm, collection particulière

Carlo Sarrabezolles, Le Génie de la mer
Plâtre patiné bronze, 55 cm x 15 cm x 35 cm, collection particulière

Carlo Sarrabezolles, Le Génie de la mer
Plâtre, 47 cm x 13 cm x 27 cm, collection particulière

Carlo Sarrabezolles, Le Génie de la mer
Plâtre, 57 cm x 15 cm x 57 cm, collection particulière

L’œuvre est achevée en 1935. Toutefois, son poids considérable et les vibrations des hélices empêchent sa mise en place sur le navire. Elle est alors exposée à Paris, en 1937, à l’occasion de l’Exposition internationale : rebaptisée L’Océan, elle trône devant le pavillon de la Marine Marchande aux abords du pont Alexandre III.

Carlo Sarrabezolles, Le Génie de la mer à l’Exposition internationale de Paris, 1937
Couverture du catalogue Carlo Sarrabezolles 1888-1971. De l’esquisse au monumental

Par la suite, la statue colossale, haute de 715 cm, est prêtée par la Compagnie Générale Transatlantique au Musée de la Marine de 1943 à 1948. En 1952, elle est érigée sur l’esplanade de la gare maritime du Havre. Elle connaît encore plusieurs déménagements au Havre – entrée du siège de la Compagnie Générale Maritime, héritière de la Compagnie Générale Transatlantique, puis port autonome du Havre devant la gare transmanche – avant son transfert à Marseille en 2002. Depuis 2010, elle s’élève sur le parvis la tour de la CMA-CGM (Compagnie Maritime d’Affrêtement / Compagnie Générale Maritime).

Carlo Sarrabezolles, Le Génie de la mer (ensemble et signature), bronze, 1935
4 quai d’Arenc, 2e arrondissement 


[1] Les photos des dessins et maquettes sont extraites du catalogue d’exposition Carlo Sarrabezolles 1888-1971. De l’esquisse au monumental, Gourcuff Gradenigo, 2008