mardi 27 octobre 2020

Les vicissitudes de Jean Bouin et de Gustave Ganay

 En septembre dernier, lors d’une discussion avec le journaliste de La Marseillaise David Coquille, je l’ai alerté sur la non-réapparition dans l’espace public des monuments à Jean Bouin (1922) de Constant Roux (1865-1942) et à Gustave Ganay (1938) d’Élie-Jean Vézien (1890-1982).


Constant Roux, Monument à Jean Bouin, 1922
Anciennement sur le parvis du stade Vélodrome, 8e arrondissement

Élie-Jean Vézien, Monument à Gustave Ganay, 1938
Anciennement sur le parvis du stade Vélodrome, 8e arrondissement

Les deux champions, l’un coureur et l’autre cycliste, encore très populaires auprès des fans de l’OM, avaient été réunis devant le Vélodrome en 1938. Néanmoins, ils gênaient pour les travaux d’agrandissement du stade et ont été enlevés.
Le résultat des investigations de David Coquille est pire que tout ce que j’avais imaginé. Visiblement, la municipalité de Jean-Claude Gaudin ne s’est guère investie dans la protection et la valorisation de ce patrimoine urbain. La statue de Jean Bouin fut proposée au Smuc (Stade marseillais université club) qui s’entraîne justement au stade Jean Bouin (65 avenue Clot Bey). Cette initiative, une bonne idée sur le papier, s’avéra néfaste à l’œuvre : le socle fut bien installé mais pas la sculpture, longtemps remisée couchée dans un coin, comme un déchet, puis rapatriée dans un local municipal des quartiers nord à la gestion plus que douteuse. Par conséquent, le bronze s’est corrodé et va demander une importante restauration.

Socle du Monument à Jean Bouin © David Coquille
65 avenue Clot Bey, 8e arrondissement

Statue de Jean Bouin abandonnée © DR

Le sort réservé au Monument Ganay ne fut pas plus enviable. Si la statue en bronze, jugée belle, n’a pas trop souffert, cela ne l’a pas sauvée du purgatoire : on l’a remisée sans velléité de la rendre aux Marseillais. Quant au mur de Cyclistes qui sert de fond au bronze, il a été démonté et laissé à l’air libre sur de vulgaires palettes dans la même réserve sulfureuse des quartiers nord.

Morceaux du mur de Cyclistes du Monument Ganay © DR 

L’article de David Coquille a été un choc et un électrochoc : la nouvelle municipalité s’est aussitôt engagée à restaurer et replacer les deux monuments dans l’espace public. Pour plus d’infos sur le sujet je vous renvoie à l’enquête de La Marseillaise des 23 octobre 2020 (p.5) et 24-25 octobre 2020 (p.7).

https://www.lamarseillaise.fr/

mardi 20 octobre 2020

Auguste Vimar

 Fabienne Bérengier, Auguste Vimar, médaillon marbre
Cimetière Saint-Pierre, 10e arrondissement

Lors de ma dernière visite au cimetière Saint-Pierre, je suis tombé sur la tombe d’Auguste Vimar que je ne connaissais pas. Elle est ornée d’un médaillon de Fabienne Bérengier (1900-1975), sans doute l’une de ses premières œuvres, réalisée vers 1920.
C’est l’occasion de donner la notice réactualisée que j’ai consacrée à cet artiste dans le Dictionnaire des peintres et sculpteurs de Provence Alpes Côte-d’Azur :

Auguste Nicolas Stanislas Vimar (Marseille, 3 novembre 1851 – Marseille, 21 août 1916), peintre, illustrateur et sculpteur animalier

Auguste Vimar, Causerie de chiens, 1885
Musée des beaux-arts de Marseille, 4e arrondissement

Auguste Vimar, Sous le charme de l’éloquence, 1905, carte postale
Ce tableau qui n’apparaît pas sur le catalogue du Salon a dû être ajouté après son impression. 

Il expose à plusieurs reprises au Salon des artistes français : Causerie de chiens (1885, n°2409) ; Ma chienne (1892, n°1683, Dijon) ; Chiens (1895, n°1891) ; Chien et chat (1896, n°2008) ; Loge d’artiste et Foyer des artistes (1897, n°1707 et 1708) ; Au bout de ma cravache (1898, n°2025) ; La grande chienne (1903, n°1731) ; Pénélope (1904, n°1803). Il fréquente également de nombreuses expositions en province où ses œuvres sont primées (Aix, Toulon, Bordeaux, Versailles) ; il est surtout assidu aux expositions de l’Association des artistes marseillais.

Auguste Vimar, Le Cheval échappé, bronze, 1902

Auguste Vimar, La Ruade, bronze, 1906

Dès les premières années du XXe siècle, il s’essaie à la sculpture. Les fondeurs Barbedienne, Siot-Decauville et Colin éditent alors ses petites statuettes : Éléphant d’Asie et singe, L’Ours brun, Un philosophe âne… Il expose très rarement ses sculptures aux expositions de l’Association des artistes marseillais : La Ruade (n°351), Mes chiens (presse-papier, n°352) et Un Âne qui brait (n°353) en 1908 ; Romanichels (plâtre original, n°369) en 1913 ; Cheval et singes (bronze, n°323) et Cheval au trot (bronze, n°324) en 1919 (exposition posthume)

Auguste Vimar, Algérie – Indochine – Océanographie, 1906
Cartes postales

À l’occasion de l’Exposition coloniale de 1906, il réalise une série de cartes postales humoristiques sur les différents exposants.

Auguste Vimar, Le Boy de Marius Bouillabès (couverture), 1906

Il illustre par ailleurs des fables de La Fontaine et de Florian (Le Lion malade et le Renard) ainsi que des albums dont il est l’auteur (Nos amis de la basse-cour ; L’Arche de Noé…) ou le co-auteur (avec Henri Signoret, La Légende des bêtes et Le Carnaval des animaux ; avec Jules Claretie, L’Oie du Capitole). Enfin, il collabore avec la presse, notamment Le Figaro illustré et Le Rire.
Il est, au demeurant, officier du Nicham Ifticar. On trouve ses peintures dans plusieurs musées des beaux-arts : à Béziers (Promenade dans le parc), à Digne-les-Bains (Intérieur d’écurie), à Marseille (La Leçon de chant, Concours régional de Marseille de 1879).

vendredi 9 octobre 2020

Douleur (Raoul Lamourdedieu sculpteur)

Raoul Lamourdedieu, La vie qui passe, pierre, vers 1940-1942
Cimetière Saint-Pierre, 10e arrondissement

Le sculpteur lot-et-garonnais Raoul Lamourdedieu (1877-1953) a réalisé un spectaculaire tombeau intitulé La vie qui passe, au début des années 1940. Une rangée d’hommes et une seconde de femmes, tels des atlantes et des caryatides, portent une dalle inclinée et abritent un gisant. Acquis par la famille Bozadjian, il se dresse aujourd’hui au cimetière Saint-Pierre.

Raoul Lamourdedieu, Douleur, bas-relief pierre, vers 1930-1940 ?
Cimetière Saint-Pierre, 10e arrondissement 

Si le tombeau retient particulièrement l’attention, il n’est cependant pas la seule œuvre de Lamourdedieu au cimetière Saint-Pierre de Marseille. Le sculpteur réalise ainsi (et signe) une élégante Douleur agenouillée et en prière, en granit sur fond de marbre noir, pour la tombe de la famille Cornier.

Raoul Lamourdedieu ou imitateur, Douleur, bas-relief pierre, vers 1930-1950 ?
Cimetière Saint-Pierre, 10e arrondissement

Cette sculpture possède un double à moins de cinquante mètres à vol d’oiseau. En effet, la tombe de la famille Carlavan arbore également une Douleur de granit sur marbre noir dans une posture identique. Celle-ci n’est cependant pas signée. Elle est sans doute l’œuvre d’un imitateur (sans doute à la demande de la famille) : certains détails paraissent effectivement plus grossiers ou plus raides comme le pied gauche. Il s’agit toutefois d’un bel exemple d’émulation artistique.