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dimanche 10 juillet 2022

Les monuments commémoratifs de la peste de 1720

Une fois n’est pas coutume : aujourd’hui je souhaite mettre en avant le travail d’une classe de CM1 de l’école Maurice Korsec, sise dans le quartier Belsunce. Les élèves avaient précédemment enquêté sur le fléau qui ravagea la cité phocéenne du 25 mai 1720 au mois d’août 1722 ; cette année, ils ont enquêté sur les trois monuments commémoratifs qui rappellent aux Marseillais ce tragique épisode : la Fontaine de la Peste et du Dévouement de Barthélemy Chardigny (1757-1813), le Monument à Monseigneur de Belsunce de Marius Ramus (1805-1888) et le Monument au Chevalier Roze de Jean Hugues (1849-1930).

Fontaine de la peste et du dévouement, tabatière en or et émail, 1er Empire
Casa-Museu Medeiros e Almeida, Lisbonne (Portugal)

Marseille. La Bibliothèque (avec la Colonne de la Peste), carte postale

Marseille. L’Évêché et la statue de Mgr de Belsunce, carte postale

Jean Hugues, Le Chevalier Roze (monument installé à la Tourette en 1886)
Photo, collection personnelle

Leurs recherches ont abouti à la réalisation d’un film, avec le partenariat du Musée d’Histoire de Marseille, dans le cadre du projet KinéKino, Peste movie 2 : Marseille 1722-2022. Je joins avec plaisir le lien conduisant à leur vidéo et j’invite chacun à la visionner !

https://cinememoire.net/actualite/1181-kinekino-peste-movie-2-marseille-1722-2022-commemorer-la-peste-de-1720-a-marseille

lundi 27 juin 2022

Projets avortés de monuments républicains (1877-1880)

La chute du Second Empire plonge la cité phocéenne dans une longue dépression, tant politique qu’économique. La répression de la Commune de Marseille, à partir du 4 avril 1871, impose un état de siège jusqu’en 1875. Cela n’empêche cependant pas la République de s’instaurer peu à peu et la ville de basculer doucement à gauche[1]. Quant à la conjoncture économique, elle se dégrade rapidement. À la suite de ses somptueux travaux d’urbanisme et d’embellissement, les caisses sont vides et la municipalité surendettée. Le chômage menace et les esprits s’échauffent, le mécontentement atteignant leur paroxysme en juin 1881 dans ce que La Gazette du Midi appelle les « Vêpres marseillaises »[2].

Colonne de la Peste devant la Bibliothèque-École des beaux-arts – carte postale

L’Évêché et la statue de Mgr de Belsunce – carte postale

Dans ce contexte difficile, la sculpture revêt un rôle de propagande de premier plan. Les projets de monuments et les discussions autour de statues existantes se multiplient au conseil municipal. Ainsi, en janvier 1877, le Génie de Barthélemy Chardigny (1757-1813), symbole républicain, reparait sur la voie publique au sommet de la Colonne de la Peste, près de la nouvelle Bibliothèque-École des beaux-arts tandis que, durant l’été 1878, Monseigneur de Belsunce de Marius Ramus (1805-1888) quitte son cours éponyme – trop central – pour l’Évêché. Néanmoins, c’est l’effigie même de la République qui préoccupe principalement les édiles dans les années 1877-1880.
Dès janvier 1877, l’érection d’un monument républicain sur la place de la Bourse est évoquée. Quelques mois plus tard, l’idée a évolué tant et si bien que le conseil municipal rédige le programme d’un concours ouvert aux sculpteurs nés ou résidant à Marseille[3]. Il s’agit de la réalisation d’une statue de la République, non  plus destinée à la place de la Bourse mais à la niche du grand escalier de l’hôtel de ville, ainsi que de l’exécution d’un buste, toujours de la République, pour la colonne de la Colline Puget. Une somme de 17 500 francs est allouée à ces travaux. Peu d’artistes semblent s’être mobilisés pour ce projet. En septembre, le jury convoqué décide que « les douze sujets exposés étaient tous plus ou moins défectueux et, par conséquent, refuse leur admission »[4]. Seule la maquette de l’architecte Ernest Paugoy[5] (1845-1906) paraît susceptible d’une rémunération de 500 francs pour sa main-d’œuvre. Elle est donc déclarée lauréate sans posséder toutefois une tenue suffisante pour une traduction définitive. De fait, ce concours ne connaît pas de suite.

Ernest Paugoy, Monument aux volontaires marseillais de 1792, 1880
Ensemble et détail
Archives municipales de Marseille 1128 W 112 

Une ultime tentative, toute aussi vaine, voit le jour le 5 août 1879 : les élus songent encore à une statue de la République pour la Salle des mariages et pour celle du conseil. De son côté, Paugoy ne désespère pas de faire ériger un projet remanié. Le 23 décembre 1880, il imagine une République révolutionnaire pour un Monument aux volontaires marseillais de 1792… sans plus de succès ! Finalement, c’est le département qui parviendra à ériger une statue de la République dans l’escalier d’honneur de la préfecture des Bouches-du-Rhône au tournant du XXe siècle (Cf. notice du 7 septembre 2021).

Addendum du 31 décembre 2022 : Paugoy expose à l’exposition du Concours régional de Marseille de 1879 les deux projets lauréats du concours de 1877 : n°442- statue de la République (plâtre) ; n°443- buste de la République (plâtre).


[1] En octobre 1879 se tient le Congrès ouvrier et socialiste de Marseille ; aux élections législatives de 1881, Clovis Hugues (1851-1907), élu de la Belle-de-Mai, est le seul député socialiste de France ; enfin, aux municipales de 1881, le radical Jean-Baptiste Brochier (1829-1886) enlève la mairie de Marseille à une droite démobilisée et abstentionniste.
[2] Un conflit social oppose alors ouvriers transalpins immigrés et main-d’œuvre locale. Cette rivalité franco-italienne se transforme en xénophobie virulente.
[3] Archives municipales de Marseille 1D116 : délibération du conseil municipal du 7 mai 1877, p.349-352.
[4] Anonyme, « Chronique locale », Le Sémaphore de Marseille, 7 septembre 1877.
[5] Les documents de l’époque égratignent fortement son nom : la délibération du conseil municipal (1D118, 11 février 1878, p.411-412) écrit Pangoy et Le Sémaphore de Marseille (7 septembre 1877) parle d’Eugène Pougoy. 

lundi 22 février 2021

La fontaine Bonaparte (Barthélemy Chardigny sculpteur)

J’ai repéré ces jours-ci, sur Ebay, un exemplaire de la médaille en bronze dédiée Au Ier Consul Bonaparte et gravée par Pierre Poize (Beaucaire, 1760 - Marseille, 1846). Sur le revers figure une représentation de la Fontaine Bonaparte, aujourd’hui partiellement disparue. C’est pour moi l’occasion de présenter la notice consacrée à ce monument dans le guide des Fontaines de Marseille.

Pierre Poize, Au Ier Consul Bonaparte, médaille, bronze, 1802
Avers et revers, Ø 43 mm

Charles Delacroix (1741-1805), premier préfet des Bouches-du-Rhône, aménage le cours Bonaparte (aujourd’hui Puget) et fait élever dans sa perspective une fontaine au niveau du carrefour avec l’actuel boulevard Notre-Dame. La ville d’Aix-en-Provence lui fournit dans ce but une colonne antique en granit qui pourrait provenir du mausolée romain inclus dans l’ancien palais comtal, rasé en 1787. Le 18 février 1801, le Conseil municipal passe commande d’un buste de Bonaparte et de bas-reliefs à Barthélemy Chardigny (Rouen, 1757 - Paris, 1813). La première pierre est posée le 13 novembre 1801 ; le monument est achevé en juillet 1802. Dans la foulée, le préfet Delacroix commandite ladite médaille commémorant l’ouverture du cours Bonaparte à Pierre Poize.
En 1807, le libraire et éditeur marseillais Joseph Chardon (1763-1837) décrit la fontaine de la sorte : « Le piédestal offre trois bas-reliefs en marbre blanc. Du côté de l’est, un trophée d’armes avec un bouclier sur lequel on a gravé ces mots en lettres d’or : À Bonaparte / Vainqueur et pacificateur / Marseille reconnaissante. Sur les côtés sont des trophées du Commerce et de l’Agriculture […]. Au bas du monument est une fontaine ».

Jean-Joseph Foucou, Pierre Puget, buste, marbre, 1816
Jardin de la colline Puget, 7e arrondissement

Avec la Restauration, en 1814, le buste est remplacé par une fleur de lys dorée puis, en 1816, les inscriptions sont effacées. En 1818, la colonne est transportée au sommet du jardin de la Colline dans l’axe du cours (rebaptisé alors cours Bourbon) et la fontaine est supprimée. En 1858, le marbrier Galinier refait le chapiteau qui est surmonté d’un nouveau buste de Bonaparte. La colonne est déplacée vers l’est. Elle porte depuis 1873 un buste de Pierre Puget (Marseille 1620 – Marseille, 1694) par Jean-Joseph Foucou (Riez, 1739 – Paris, 1821), réalisé en 1816, sorti des collections du musée des beaux-arts.

samedi 22 février 2020

Nouvel accrochage des salles XIXe au Palais Longchamp

Pour fêter le 150e anniversaire de l’inauguration du Palais Longchamp (1869-2019), le musée des beaux-arts a réaménagé les espaces du premier étage consacré à l’art du XIXe siècle et du début du XXe. Évidemment, il n’était pas question de recréer la scénographie de 1910 avec les statues en rang d’oignon et les tableaux aux cimaises.

Palais Longchamp, galerie des sculptures
Carte postale, vers 1910

Toutefois, cela a été l’occasion d’une importante campagne de restauration et de sortir des tableaux et des sculptures qui n’avaient pas reçu l’hommage du public depuis longtemps.

Henri Lombard et Jules Cantini, Hélène
Statue en marbres polychromes et onyx, 1885

Le public est désormais accueilli dès la billetterie par la statue de la reine de Sparte, la belle Hélène, œuvre conjointe du sculpteur marseillais Henri Lombard (1855-1929) et du marbrier Jules Cantini (1826-1916). Cette œuvre hiératique, réalisée à Rome pendant le pensionnat de l’artiste à la Villa Médicis (1884-1888), a récemment triomphée à Paris comme tête d’affiche de l’exposition La sculpture polychrome en France 1850-1910 (musée d’Orsay, 12 juin-9 septembre 2018).

Antoine-Louis Barye, Fauves, groupes en plâtre, vers 1865

À l’étage, l’entrée des salles d’exposition est scandée par deux paires de groupes animaliers. Il s’agit des maquettes des sculptures surmontant les piliers du jardin du Palais Longchamp. Commandées le 24 juin 1864 à Antoine-Louis Barye (1795-1875), elles figurent à gauche un Lion terrassant un bouquetin et un Tigre terrassant une biche puis à droite, un Lion terrassant un sanglier et un Tigre terrassant une gazelle.

Barthélemy Chardigny, Le Mariage samnite, groupe en plâtre, 1802

Dans les salles, parmi les sculptures nouvelles sorties des réserves on trouve Le Mariage samnite de Barthélemy Chardigny (1757-1813), une œuvre néoclassique que le statuaire rouennais expose au Salon de Marseille – où il réside alors – en l’an XI (1803).

André Allar, Hécube et Polydore, bronze galvanoplastique, 1873

Le sculpteur toulonnais André Allar (1845-1926) réalise ce bas-relief, pour sa version en plâtre, à la Villa Médicis en 1871. Il s’agit de l’envoi de sa première année à Rome. Il a choisi un épisode mythologique, tiré des Métamorphoses d’Ovide, figurant Hécube, la reine de Troie, retrouvant Polydore, le plus jeune de ses enfants, mort sur la plage. Ce sujet fait écho à sa propre vie puisqu’il vient de perdre son fils Ernest à peine âgé de trois ans. Le coulage du bronze galvanoplastique est une commande de la ville de Marseille du 7 janvier 1873.

Henri Allouard, Jeune femme Peul, statuette en onyx, verre et pierre, vers 1904

L’artiste parisien Henri Allouard (1844-1929) est célèbre pour ses créations polychromes. Au début du XXe siècle, il conçoit une Jeune femme Peul avec un œil d’ethnologue autant que de sculpteur. C’est une belle surprise que cette statuette !

Henri Lombard, Rosine la Florentine, bronze, vers 1885-1900

Bouclons la boucle avec Henri Lombard et son superbe buste d’Italienne en bronze. Le musée ne sait pas grand-chose de son histoire. Pour ma part, je connais d’autres exemplaires de cette jeune femme, mais de moins belle facture. La fille du sculpteur en conservait un que j’ai pu voir à son domicile en 1995. C’est ainsi que j’ai appris que ce buste s’intitulait Rosine la Florentine. Lombard a certainement rencontré son modèle lors de son séjour romain et l’a repris par la suite à plusieurs reprises.