mardi 30 janvier 2024

Tigre terrassant une biche (Antoine-Louis Barye sculpteur)

Cet après-midi, l’hôtel des ventes de Limoges (maître Paul Pastaud commissaire-priseur) vend un beau bronze d’Antoine-Louis Barye (1795-1875) figurant un Tigre terrassant une biche.

Antoine-Louis Barye, Tigre terrassant une biche, groupe, bronze, 28 x 48 cm, après 1876
Lot 177, estimé 2 000/2 500 €

Il s’agit de l’édition d’un motif conçu pour l’entrée du jardin du Palais Longchamp. En effet, le 24 juin 1864, le Conseil municipal de Marseille attribue la réalisation des quatre groupes animaliers devant surplomber les piédestaux des portes du jardin à Barye. Moyennant 48 000 francs soit 12 000 francs par sculpture, le sculpteur imagine, à gauche, un Lion terrassant un bouquetin et un Tigre terrassant une biche et, à droite, un Lion terrassant un sanglier et un Tigre terrassant une gazelle. Il réalise alors les maquettes de chaque ensemble pour les soumettre à l’architecte Henry Espérandieu et à l’administration commanditaire.

Antoine-Louis Barye, Tigre terrassant une biche, maquette en plâtre, vers 1865
Musée des Beaux-Arts de Marseille © Marseille, musée des Beaux-Arts / Almodovar-Vialle

Antoine-Louis Barye, Lion terrassant un bouquetin et Tigre terrassant une biche
Maquettes en plâtre, vers 1865, musée des Beaux-Arts de Marseille

Les groupes en pierre de Calissanne sont réceptionnés, achevés, le 19 novembre 1867.

Louis-Antoine Barye, Lion terrassant un bouquetin et Tigre terrassant une biche
Groupes, pierre, 1867, Palais Longchamp, 4e arrondissement

Louis-Antoine Barye, Tigre terrassant une biche, groupe, pierre, 1867
Palais Longchamp, 4e arrondissement

La ville de Marseille, propriétaire des maquettes, n’autorise pas l’artiste à en tirer des bronzes. Cependant, à la mort de Barye, une vente du fonds d’atelier en 1876 met sur le marché nombre d’esquisses en plâtre rachetées par des fondeurs comme Ferdinand Barbedienne (1810-1892) pour effectuer des tirages posthumes. Un exemplaire en plâtre du Tigre terrassant une biche est, quant à lui, acquis par le marchand d’art Hector Brame (1831-1899) qui l’édite en bronze, contrevenant de fait au souhait de la municipalité.

mardi 16 janvier 2024

L’horloge néobaroque de la maison David Frères

David Frères, horloge néobaroque, 1912-1922 © Xavier de Jauréguiberry
Préfecture des Bouches-du-Rhône, 6e arrondissement

En 1856, le menuisier-ébéniste Victor David fonde sa fabrique de meubles à Marseille. En 1897, ses fils Joseph et Jules David reprennent l’entreprise paternelle qui devient David Frères. Juste avant la Première Guerre mondiale, Julien et Victor, les fils de Joseph, intègrent la manufacture et se lancent dans la confection de leur chef-d’œuvre après un stage à Paris : une horloge de style néobaroque sur le thème du poème Mirèio (Mireille, 1859).
Mesurant 288 cm de hauteur, 109 cm de largeur et 66 cm de profondeur, l’horloge galbée présente les bustes des héros de Frédéric Mistral (1830-1914). Mireille est l’archétype de la Provençale avec sa coiffe traditionnelle sur ses cheveux attachés et son collier perlé orné d’une croix ; Vincent porte une chemise avec un col en V. Au sommet de l’horloge, la statuette d’un Putto tient une petite branche d’olivier, attribut de la Paix et emblème de la Provence. Ces sculptures sont l’œuvre d’Émile Cannac (Marseille, 23 octobre 1873- ?), un artiste qui semble se reconvertir un temps dans l’épicerie après 14-18. Les modèles sont traduits en bronze par D. Pieroni, fondeur de cuivre installé au 42 bd Vauban, puis ciselés et dorés dans les ateliers de David Frères.

Émile Cannac, Mireille, buste, bronze doré © Xavier de Jauréguiberry

Émile Cannac, Vincent, buste, bronze doré © Xavier de Jauréguiberry

Émile Cannac, Putto, statuette, bronze doré © Xavier de Jauréguiberry

Julien et Victor David s’occupent plus spécifiquement des plaquages et des marqueteries, notamment les chutes de fleurs et les médaillons figurant trois scènes animées caractéristiques de la Provence : la Farandole, l’Olivaison ou récolte des olives et la Transhumance des moutons.

Julien et Victor David, La Farandole, marqueterie de bois © Xavier de Jauréguiberry

Julien et Victor David, L’Olivaison, marqueterie de bois © Xavier de Jauréguiberry

Julien et Victor David, La Transhumance, marqueterie de bois © Xavier de Jauréguiberry

L’horloge est exhibée dans le stand de la maison David Frères lors de l’Exposition coloniale de Marseille en 1922. La manufacture obtient à cette occasion un grand prix. Après cet événement qui conforte sa renommée, l’horloge est installée dans l’escalier du nouveau siège construit en 1925 au 45 cours Gouffé.

Plaque commémorative © Xavier de Jauréguiberry

Hall et escalier de la maison David Frères, vers 1930
Catalogue David Frères, collection personnelle

Elle y demeure jusqu’à la liquidation de l’entreprise à la fin du XXe siècle. La famille David décide alors de l’offrir à la préfecture des Bouches-du-Rhône afin que ce chef-d’œuvre passe à la postérité. C’est aujourd’hui chose faite : depuis le 14 mars 2008, elle est classée Monument historique.

jeudi 4 janvier 2024

Jules Cantini (Théodore Rivière sculpteur)

En décembre dernier, j’ai pu acquérir aux enchères une sculpture que je recherchais et convoitais depuis une vingtaine d’années : les portrait du marbrier marseillais Jules Cantini (1826-1916) par le sculpteur toulousain Théodore Rivière (1857-1912).

Théodore Rivière, Jules Cantini, statuette, bronze, 32 x 13 x 10 cm, vers 1905
Collection personnelle

Au début du XXe siècle, le portrait-statuette connaît une grande vogue. Théodore Rivière s’en fait une spécialité, encouragé par le pharmacien-mécène Angelo Mariani (1838-1914) : il portraiture en pied ses proches, ses amis, ses relations, les personnalités qu’il admire. Jules Cantini est sans doute l’une de ses relations professionnelles ; il lui fournit probablement les onyx et les marbres de couleur qu’il utilise dans ses sculptures polychromes.
La figurine est réalisée en terre cuite vers 1905. Le modèle dégage un air bonhomme. Il apparaît en artiste sculpteur un maillet à ses pieds, son béret mou et sa lavallière ; l’aspect industriel est gommé.


Théodore Rivière, Jules Cantini, statuette, terre cuite blanche, 31 x 14 x 10 cm, vers 1905
Musée des beaux-arts de Marseille, legs Cantini en 1917 (C.1718)

La statuette est fondue en bronze par Louis Gasne qui, en 1901, reprend la Société anonyme de fonderie artistique, branche de la fonderie Victor Thiébaut. Elle est ensuite exposée du 16 au 25 novembre 1905 à la Galerie des artistes modernes Chaine et Simonson (19 rue Caumartin, Exposition Théodore Rivière, n°3).


Théodore Rivière, Jules Cantini, statuette, bronze, 32 x 13 x 10 cm, vers 1905
Collection personnelle