mercredi 28 août 2024

Joseph Luc

Voici une nouvelle notice enrichie du Dictionnaire des peintres et sculpteurs de Provence Alpes Côte-d’Azur :

Luc Joseph Félix Marguerite (Martigues, 14 janvier 1870 - ?), sculpteur
Élève d’Émile Aldebert (1827-1924) et de Stanislas Clastrier (1857-1925), il exhibe ses œuvres – principalement des portraits – aux expositions de l’Association des artistes marseillais de 1890 à 1895 : Portrait d’homme (n°358), Portrait de femme (359) et Guerrier (statuette) en 1890 ; Buste marbre (n°484), Buste plâtre (n°485) et Médaillon (n°486) en 1891 ; Mon Portrait, buste plâtre (n°459), Portrait de M. A… (n°460) et Portrait de Mlle B… (n°461) en 1892 ; Portrait de Mlle M.-L. G…, buste plâtre (n°309), et Portrait de M. et Mme S…, médaillon (n°309bis).

Joseph Luc, Pierre-Antoine Verpillat, buste, pierre, circa 1890
Tombe de la famille Verpillat, cimetière Saint-Pierre, 10e arrondissement

Joseph Luc est l’auteur d’un buste au cimetière Saint-Pierre. Il s’agit très vraisemblablement du portrait du papetier lyonnais Pierre-Antoine Verpillat (1846-1887) qui décède à Marseille le 6 janvier 1887. Les attributs sous le buste – presse, journal Le Petit Marseillais, plume – le laisse penser.
Après ses études artistiques à Marseille, il poursuit son cursus à Paris. Il entre le 9 avril 1897 dans l’atelier d’Ernest Barrias (1841-1905) à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris. Il semble s’établir définitivement dans la capitale où il épouse une certaine Blanche Baptistine Bouvier. Pendant la Première Guerre mondiale, il est mobilisé le 2 août 1914 mais est réformé le 26 avril 1915 à cause d’un emphysème pulmonaire et de surdité. Au passage, son dossier militaire révèle qu’il mesure 1,60 m.

lundi 19 août 2024

Une œuvre de François Roume au Brésil

Par le biais du galeriste Jamie Mulherron, j’ai découvert une œuvre du sculpteur marseillais François Roume (1873-1960) conservée à la Fondation Oswaldo-Cruz, à Rio de Janeiro, au Brésil. 

François Roume, Femme atteinte d’un cancer de la thyroïde, buste, plâtre, 1911
Fondation Oswaldo-Cruz, Rio de Janeiro (Brésil)

Il s’agit d’un buste en plâtre, haut de 77 centimètres, figurant une femme affublée d’un goitre. Cette hypertrophie de la thyroïde est l’un des symptômes du cancer de la thyroïde. Le sculpteur expose son œuvre à l’Exposition internationale d’Hygiène de Dresde (Allemagne) en 1911. 
Ce buste s’inscrit dans la longue lignée de moulages et de sculptures anatomiques et/ou pathologiques des XVIIIe et XIXe siècles. D’ailleurs, le frère cadet de François Roume – Étienne Marius Roume (1874- ?) – est docteur en médecine. Il est fort possible que le modèle soit l’une de ses patientes et qu’il ait demandé à son aîné de reproduire ses traits à titre documentaire et scientifique ; à moins qu’il ne s’agisse d’un membre de la famille.
Lorsque le sculpteur s’expatrie en Argentine, il emporte visiblement le portrait qui finit par entrer, sans doute sous la forme d’un don, dans les collections patrimoniales de l’Institut – devenu fondation en 1974 – Oswaldo-Cruz. Cette institution brésilienne, fondée en 1900 pour trouver un vaccin à la peste, est à la pointe de la recherche sur les maladies tropicales en Amérique du Sud.

lundi 5 août 2024

L’Agriculture entre le Commerce et l’Industrie (Henri Lombard sculpteur)

Anonyme, Frédéric Lombard, photographie, s.d.
Archives de la famille Lombard-Souche

Le percement de la rue Colbert, en 1886-1887, est l’une des rares réalisations urbanistiques de la fin du XIXe siècle à Marseille après les grands travaux du Second Empire. Il s’agit alors de désenclaver le quartier de la Blanquerie, situé derrière le palais de la Bourse. Le lotissement de cette artère nouvelle échoit en grande partie à l’architecte phocéen Frédéric Lombard (1850-1906) : n°1, 3, 5, 12 et 20 de la rue Colbert.

Frédéric Lombard, Immeuble Moricelli, 1892-1893
3 rue Colbert, 1er arrondissement © Stones investissements de prestige

Signature de l’architecte
3 rue Colbert, 1er arrondissement

La parcelle du n°3 appartient alors à Louis Isidore Moricelly, dit Moricelly aîné (1830-1894)… Attention, l’I d’Isidore se transforme souvent J dans les documents imprimés ! Héritier d’une dynastie de boulangers de Carpentras, Moricelly aîné s’installe à Marseille en 1858. Il s’enrichit rapidement en contrôlant en amont la production de la farine. Dès 1860, il se déclare minotier et négociant en grains. Entre 1861 et 1867, il devient l’un des principaux fournisseurs du corps expéditionnaire français au Mexique. Par ailleurs, en 1870, il dépose un brevet pour un sasseur mécanique à courant d’air comprimé. Il est récompensé de multiples médailles d’or (Exposition universelle de 1878…) et de diplômes d’honneur (Exposition industrielle de Marseille, 1879…). Enfin, il reçoit la Légion d’honneur (chevalier en 1885 ; officier en 1891).
Pour célébrer sa réussite professionnelle et son ascension sociale, mais aussi pour distinguer l’entrée principale de son immeuble des accès secondaires menant aux appartements locatifs, il commande une porte monumentale couronnée d’un imposant décor sculpté. À cet effet, l’architecte s’adresse à l’ornemaniste Adolphe Royan (1969-1925) et surtout à son frère, Henri Lombard (1855-1929), grand prix de Rome de sculpture en 1883.

Henri Lombard, L’Agriculture entre le Commerce et l’Industrie, dessus-de-porte, pierre, 1893
3 rue Colbert, 1er arrondissement

Le statuaire conçoit pour cet exceptionnel dessus-de-porte un programme évoquant les différentes activités du commanditaire. Au centre, l’allégorie de l’Agriculture repose sur des gerbes de blé, sa faucille à la main. De part et d’autre, deux jeunes génies symbolisent l’un l’Industrie avec une meule à grains se substituant à la traditionnelle roue crantée, l’autre le Commerce avec son caducée.

Henri Lombard, Le Commerce, dessus-de-porte (détail), pierre, 1893
3 rue Colbert, 1er arrondissement

Au demeurant, ce dernier s’appuie sur un cartouche de cuirs enroulés arborant le monogramme du propriétaire : un M cernés d’épis. Enfin, entre ses pieds, l’artiste appose sa signature sur une banderole.

Henri Pinta, Cérès, gravure d’un plafond de l’immeuble Moricelly, 1894
Catalogue illustré du Salon de 1894

L’iconographie se poursuit à l’intérieur avec un plafond du Marseillais Henri Pinta (1856-1944), grand prix de Rome de peinture en 1884. Cette toile marouflée représente Cérès, déesse romaine des moissons. Elle est exposée au Salon des artistes français de 1894 (n°1474) ; elle est aujourd’hui conservée sous un faux-plafond. Hélas, Moricelly aîné n’en profite pas ! Il décède le 25 mai 1894 à Marseille, pendant ledit Salon. En revanche, sa veuve demeure de longues années dans l’immeuble de la rue Colbert : son nom apparaît encore à cette adresse dans l’Indicateur marseillais de 1922.