mercredi 25 juin 2025

Étiennette Gilles

Cette semaine, la Société …?Prouvenço !... a fait don au Musée d’histoire de Marseille d’un buste en plâtre patiné de Frédéric Mistral (1830-1914) par Étiennette Gilles. Cet événement me donne l’occasion de donner la notice biographique de cette artiste que j’ai publiée dans Marseillaises. Le dictionnaire (éditions Gaussen, 2025, p.217-218).

Gilles Joseph Étiennette (Marseille, 18 novembre 1894 – Marseille, 14 décembre 1981)
Artiste pluridisciplinaire, elle est élève à l’École municipale des Beaux-Arts pendant la Première Guerre mondiale où elle se forme exclusivement au dessin et à la peinture. Elle y obtient plusieurs récompenses dont un 1er prix d’après la bosse en 1916. Son goût pour la statuaire se développe plus tardivement : elle s’y initie dans l’atelier de Paul Gondard (1884-1953) vers 1920. Dès lors, elle mène de front une carrière de peintre et de sculptrice quoiqu’elle expose davantage d’œuvres sculptées : Le Christ à Gethsémani et Virginité (bustes, Salon de l’Art chrétien à Paris, 1921, et exposition des Artistes marseillais, 1921) ; Docteur Max Gilles – buste de son père – et Provençale à la fontaine – peinture (exposition des Artistes marseillais, 1923) ; La Vierge aux lavandes (statue décorative, saison d’art, Aix, 1926) ; Mas provençal à Eyragues – peinture – et buste de l’Amiral Courbet (Union des artistes de Provence, 1928) ; Clochettes marseillaises et L’Amour des livres (sculptures, Salon rhodanien, 1933) ; Émile Ripert (buste, Salon artistique, 1941)… En 1931, elle participe au concours du Monument à Frédéric Mistral, destiné au plateau Longchamp et remporté par Louis Botinelly (1883-1962, cf. notice du 20 mars 2021) ; elle se classe troisième et reçoit une prime de 500 francs.

Étiennette Gilles, Frédéric Mistral, plâtre patiné, 1931
Désormais conservé dans les réserves du Musée d’Histoire de Marseille 
© Marie-Noëlle Perrin

Dans l’Entre-deux-guerres, Étiennette Gilles épure, voire stylise, son trait pour se faire illustratrice. Pour la Petite histoire familière de la crèche et du santon (Marcel Provence, 1925), elle dessine des santons en noir et blanc, d’une ligne plus âpre et moins naïve que celle de son co-illustrateur David Dellepiane (1866-1932).

Marcel Provence, Petite histoire familière de la crèche et du santon, couverture, 1925

Étiennette Gilles, Santons, terre cuite émaillée, sans date
Vente aux enchères Marseille (De Baecque, lot 35), 30 novembre 2023

Elle réalise ensuite vingt-cinq planches plus fouillées, dans le goût art déco, pour orner la réédition de Lou libre de l’amour de Théodore Aubanel (1928). Elle donne aussi un charmant bois gravé pour accompagner Avec Mistral sur les routes de Provence (Émile Ripert, 1931). Par ailleurs, dans les années 1950, elle exécute des estampes sur des sujets religieux comme Notre-Dame du Rosaire ou Saint Thomas d’Aquin (couvent des Dominicains, Montréal, Canada).
Elle construit une œuvre variée composée de portraits sculptés ou peints, de tableaux de fleurs ou de paysages, de gravures, d’art décoratif (Poupées, céramique, saison d’art, Aix, 1925 – médaille d’argent), de textile (Coussins, saison d’art, Aix, 1926)... Ses thèmes de prédilection sont la religion et la provençalité. Le musée d’Histoire de Marseille conserve d’elle La Vieille servante (peinture) et celui de Notre-Dame de la Garde une tête du Christ à la couronne d’épine (dessin).

Étiennette Gilles, La Vieille servante, h/t, sans date
Musée d’histoire de Marseille © FCAC Ville de Marseille

Étiennette Gilles, Le Christ à la couronne d’épine, dessin, vers 1921
Musée de Notre-Dame de la Garde © Jacqueline Poggi

Étiennette Gilles, La Pieuvre, plaque de cheminée, terre cuite, sans date
Collection particulière

mercredi 11 juin 2025

Les Crapauds (Alain Paris sculpteur)

Maçon de formation, le sculpteur-plasticien marseillais Alain Paris (né en 19..) est l’auteur des Crapauds qui, depuis 2013, colonisent la ville. Ces batraciens étranges sont, selon leur créateur, les premiers habitants de la région, avant même l’arrivée des Grecs de Phocée : à une époque où le paysage local était constitué de marécage, ces amphibiens antédiluviens évoluaient en eau trouble ; leurs grands yeux vides affleurant à la surface, ils ont assisté à l’avènement de l’Homme.
Conçus en plâtre et bariolés de couleurs flashy qui le protègent des intempéries, les Crapauds ont pour objectif initial d’attirer l’attention sur les dégradations urbaines de façon ludique… au risque de subir eux-mêmes ce délabrement. C’est le cas du malheureux du Crapaud relégué dans un coin de la rue Saint Bazile : posé sur une palette, parqué derrière d’inutiles barrières, le batracien rose fluo s’abime dans la plus grande indifférence.

Alain Paris, Crapaud, plâtre polychromé
Rue Saint Bazile, 1er arrondissement

Pour autant, au fil du temps, les Crapauds ont gagné leurs lettres de noblesse. Ils ne sont plus installés sans autorisation dans l’espace public. Ce sont désormais des monuments que l’on met en valeur et inaugure très officiellement tel le Crapaud de l’Escale Borély en avril 2022.

Alain Paris, Crapaud, plâtre polychromé, 2022
Escale Borély, 8e arrondissement

S’il n’a pas encore eu les honneurs du musée, au moins figure-t-il déjà dans certaines institutions comme le commissariat central Noailles, sur la Canebière. En effet, en 2019, Alain Paris lui a offert un Crapaud flic tricolore, haut de 1,60 m et arborant un képi, pour remercier la police nationale de ses missions à Marseille.

Alain Paris, Crapaud flic, plâtre polychromé, 2019
Commissariat central Noailles, 66-68 La Canebière, 1er arrondissement

Quant aux amateurs, ils peuvent eux aussi disposer de leur propre Crapaud en version miniature en se rendant sur le site de l’artiste https://paris-alain.com/ et moyennant environ 90 € !

Alain Paris, La Fiesta, mini Crapaud

Alain Paris, La Connasse, mini Crapaud