Le 8
septembre 1829, la tâche échoie à Jean-Baptiste Chanuel (1788-1857), sculpteur
et peintre toulonnais installé à Marseille. Quoiqu’il ne se déclare pas
orfèvre, il possède certainement une formation a minima de ciseleur car,
contrairement au bronzier parisien, il propose de reproduire la statue par la
technique du repoussé, dite aussi du relevé. Ce procédé laborieux et délicat
nécessite de marteler le métal feuille à feuille, de souder les fragments entre
eux, puis de les fixer sur une armature. Pendant cinq ans, au rythme de dix
mille coups de marteau par jour, Chanuel s’échine à copier le plâtre de Cortot.
Souvent, un mois de labeur disparaît en un instant, à cause d’une braise trop
ardente qui altère un pli de la toge ou les traits d’un visage. La matière
ductile se ramollit et s’affaisse ; tout est à recommencer !
À
force d’opiniâtreté, la statue d’argent est quasiment achevée en 1834. Cette
année-là, elle est sélectionnée pour participer à Paris, à la 8e Exposition des produits de l’industrie française, du 1er mai au 29
juin, où elle obtient une médaille de bronze. À son retour à Marseille, Chanuel
la peaufine encore jusqu’en 1835. Plus petite que son modèle, elle mesure 6
pieds (1,82 m) et est constituée de 43 kg d’argent (ou 53 kg selon les
sources). Son coût s’élève à 30 000 francs répartis de la sorte :
12 000 francs pour le matériau précieux, 14 000 francs pour le
travail et 4 000 francs de gratification pour l’artiste.
Le 30 juin 1837, les administrateurs de Notre-Dame de la Garde se rendent dans l’atelier de l’orfèvre, 38 rue des Dominicaines, afin de procéder à la réception de la sculpture qui est déclarée conforme au cahier des charges. Le 2 juillet suivant, Mgr Fortuné de Mazenod la bénit sur le Cours (Cours Belsunce), puis la conduit à la cathédrale où elle demeure jusqu’au 4 juillet. Enfin, une longue procession l’escorte au Fort de la Garde et l’installe sur l’autel de la chapelle. Dès cet instant, elle devient l’image mariale la plus vénérée du sanctuaire et la plus représentée.
En
1855, l’ancienne chapelle est détruite pour laisser la place à la nouvelle
église construite par Henry Espérandieu (1829-1874) et consacrée le 4 juin
1864. Le lendemain a lieu la translation solennelle de la Vierge d’argent dans
le chœur du nouvel édifice.
Hélas,
le 4 juin 1884, un incendie ravage le maître-autel sur lequel elle repose.
Endommagée, elle nécessite une importante restauration. Elle est envoyée à
Paris – un demi-siècle après son précédent voyage – dans la fabrique
d’orfèvrerie et de bronze religieux d’Alexandre Chertier (1825-1890), lauréat
d’un grand prix à l’Exposition universelle de 1878. Le coût de la réparation
s’élève à 7 386,95 francs, permettant au chef-d’œuvre de Chanuel de
retrouver sa prestance et l’affection des pèlerins.
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