samedi 14 octobre 2023

La sculptrice Claude Vignon et Marseille

Notice nécrologique de Claude Vignon
Le Monde illustré, 21 avril 1888, p.249

Ayant parlé de son beau-père et de son mari dans ma précédente chronique, il me semble opportun d’évoquer Claude Vignon, pseudonyme de Marie-Noémi Cadiot (Paris, 1828 – Saint-Jean-Cap-Ferrat, 1888). Je ne reviendrai pas sur le parcours de cette artiste, sculptrice et femme de lettres, laissant Le Monde illustré brosser son portrait. Pour ma part, je me contenterai d’évoquer ses liens ténus avec la cité phocéenne.

Claude Vignon, Daphné changée en laurier
Statue, marbre, H. 2,10 m, 1866
Musée des beaux-arts de Marseille, 4e arrondissement

En 1867, Claude Vignon exhibe sa Daphné à l’Exposition universelle de Paris où elle est acquise par l’État. En 1873, celui-ci la dépose au musée des beaux-arts de la ville de Marseille. Il est probable que son mariage avec le député républicain de Marseille Maurice Rouvier (1842-1911), le 3 septembre 1872, n’y est pas étranger soit que l’homme politique ait appuyé ce dépôt, soit que l’Administration ait trouvé cet envoi pertinent.
La sculptrice, qui se fait désormais appeler Mme Rouvier dans la vie civile, suit de temps en temps son époux à Marseille. Elle loge alors chez son beau-père, François Rouvier (1811-1890), au n°38 du boulevard du Jardin Zoologique. C’est notamment le cas en 1879, année où elle participe au Concours régional de Marseille. Elle y expose le buste en plâtre de M. Grévy, président de la République (n°551) ; il s’agit d’une œuvre récente puisque Jules Grévy (1807-1891) est élu président le 30 janvier 1879. Elle présente également le buste en terre cuite de son mari (n°552), même si le catalogue le prénomme Marius ! Cette fois, il s’agit d’une œuvre plus ancienne qu’elle a déjà exposée au Salon des artistes français, à Paris, en 1875 (n°3440).

Achat au Salon de 1879
Claude Michelez, Album photographique des acquisitions de l’État au Salon de 1879
Archives nationales, F/21/7649, f°27

La même année 1879, Claude Vignon montre au Salon des artistes français de 1879 le buste en marbre de M. Thiers, premier président de la République française (n°5412). Ce portrait du Marseillais Adolphe Thiers (1797-1877), commandé par le ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts deux ans après la disparition du modèle, est aussitôt attribué au musée des beaux-arts de sa ville natale. Toutefois, si elle est exposée dans la galerie des sculptures, ce n’est que pour peu de temps. En effet, en janvier 1881, le radical Jean-Baptiste Brochier (1829-1886) remporte les élections municipales et le siège de maire : celui-ci s’oppose aussitôt à l’érection d’un monument public en l’honneur de l’homme qui a brisé la Commune ; il est probable que le buste soit alors remisé dans les réserves du musée.
Le portrait de Thiers sort vraisemblablement de son purgatoire en 1930 au moment où le Grand Lycée prend le nom de Lycée Thiers… contre l’avis de la municipalité de gauche qui aurait préféré le nom moins polémique d’Edmond Rostand ! C’est sans doute à cette époque où on l’érige dans la cour d’honneur dudit lycée… où il ne reste guère ! Lors des événements de mai 1968, les lycéens rebaptisent leur école Lycée de la Commune de Paris ! Dans ces circonstances, on déplace le buste dans un couloir, puis finalement, en 1990, un employé le déménage dans les réserves d’une extension moderne de l’établissement.

Claude Vignon, Adolphe Thiers premier président de la République française
Buste, marbre, 78 x 55 cm, 1879
Lycée Thiers, 1er arrondissement
© David Coquille

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