Une fois n’est pas coutume, je quitte
Marseille pour Toulon afin d’évoquer une exposition dont je suis le commissaire
scientifique et qui ouvre ses portes au public la semaine prochaine.
Le
Musée d’Art de Toulon et le château des Bormettes à La Londe les Maures
recourent, dans de la seconde moitié du XIXe siècle, à la même
équipe d’architectes et de décorateurs : le théoricien de la polychromie
monumentale Paul Sédille (1836-1900), le céramiste Jules Loebnitz (1836-1895) et
surtout les frères André et Gaudensi Allar (1845-1926 / 1841-1904). Ces
derniers, l’un sculpteur l’autre architecte, s’associent dans les mêmes temps afin
d’offrir à leur ville natale et à ses environs quelques-uns de leurs plus
remarquables monuments.
L’exposition
du MAT, en partenariat avec la Mairie et l’Office de tourisme intercommunal de
La Londe les Maures, propose une balade d’un territoire à l’autre.
La
première étape s’effectue au château des Bormettes, petit joyau d’éclectisme
voulu par ses propriétaires successifs. Alors que le peintre Horace Vernet
(1889-1963) conçoit avec l’architecte hyérois Victor Trotobas (1807-1884) une
demeure de type maison-forte médiévale à la fin des années 1850, l’industriel
Victor Roux (1819-1893) remanie et agrandit le château en une agréable
villégiature entre 1874 et 1890. Ses maîtres d’œuvre, Paul Sédille et Gaudensi
Allar, ajoutent de multiples références Renaissance et orientalistes, notamment
par l’adjonction de décors en terre cuite émaillée provenant de la manufacture
Loebnitz.
André Allar et Ferdinand Gaidan (1824-1900), L’Agriculture, Le Travail et La Famille, 1890
Bas-reliefs, terre cuite émaillée, Château des Bormettes, La Londe les Maures
Seuls décors en terre cuite émaillée non réalisés par Jules Loebnitz, ces bas-reliefs sont réalisés à Marseille dans l’atelier du céramiste et chimiste Ferdinand Gaidan. Ils sont aujourd’hui en mauvais état.
Le château des Bormettes met en lumière l’entreprise de faïences décoratives de Jules Loebnitz dont on découvre aujourd’hui l’importance et l’influence en Provence. Le prêt de céramiques, de photographies, de peintures et de magnifiques planches de catalogues par le MUDO – Musée de l’Oise montre cette interaction artistique et industrielle entre Paris et la province. Ainsi, grâce à la collaboration de ses amis Paul Sédille et André Allar, le céramiste triomphe-t-il lors des Expositions universelles de 1878 et 1889.
Le
parcours s’achève avec les frères Allar, gloires toulonnaises de la fin du XIXe siècle, notamment André qui reste l’unique grand prix de Rome de sculpture varois.
Durant la décennie 1880-1890, ils œuvrent de concert à l’École Rouvière, à la
Fontaine de la Fédération et au Musée-Bibliothèque, leur chef-d’œuvre. Là, le
statuaire conçoit quatre cariatides en pierre pour les loggias mais également des
petits panneaux en terre cuite émaillés par Loebnitz.
L’exposition,
qui se tient dans le cabinet d’arts graphiques, présente une soixantaine de
documents variés : peintures, sculptures, gravures, photographies, céramiques…
Elle apporte un éclairage nouveau sur des personnalités aujourd’hui méconnues,
sur des patrimoines à redécouvrir et à protéger.
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