lundi 6 juin 2022

Face (Alexandra Gestin sculptrice)

En 2011, le leader européen des centres commerciaux Klépierre Ségécé lance la rénovation du Centre Bourse dont il est le propriétaire, en partenariat avec Axa et les Galeries Lafayette. La métamorphose est confiée au cabinet parisien d’architecture Moatti & Rivière[1] et à l’architecte marseillais Georges Raskin. Le complexe commercial se pare d’une nouvelle façade. À l’intérieur, la circulation est entièrement revue, notamment grâce à la création d’un nouvel escalator desservant la FNAC et les Galeries Lafayette.
Dans le cadre de ces travaux, la sculptrice – qui préfère le masculin sculpteur comme on le voit à sa signature – Alexandra Gestin (née en 1967 à Guérande, Loire-Atlantique) est sollicitée afin d’habiller un élément structurel disgracieux qui ne pouvait être ni détruit ni dissimulé : un corbeau soutenant le départ dudit escalator.

Alexandra Gestin, Puissance, statue en résine laquée bleue

Alexandra Gestin, Souplesse, statue en bronze

Alexandra Gestin, La Lutte, groupe en bronze peint
Reproduits avec l’autorisation de l’artiste à partir de son site www.alexandragestin.com

Cette artiste, fortement inspirée par la culture japonaise, a fait de la représentation de lutteurs de sumo une spécialité. Pour la commande phocéenne, elle décide de détourner une œuvre préexistante : Face, un masque de sumotori en polyester ou en résine. Jusque-là, la figure était exposée sur un support de bois ; désormais, elle devient un élément architectural.

Alexandra Gestin, Face, polyester sur bois peint

Alexandra Gestin, Face, résine sur bois peint floquée en rose fluo
Reproduits avec l’autorisation de l’artiste à partir de son site www.alexandragestin.com

Alexandra Gestin, Face, masque en résine, 2013
Centre Bourse, 17 Cours Belsunce, 1er arrondissement

Si la seule ambition d’Alexandra Gestin est alors de faire vivre un sumotori sur un mur en créant un effet de surprise ludique, Face – me semble-t-il – renoue inconsciemment avec plusieurs traditions de la sculpture française. La mine grimaçante du lutteur nippon dans un temple du commerce peut rappeler les figures de moines grimaçants sur les chapiteaux de cloîtres romans. Par ailleurs, la fonction de support peut également évoquer les atlantes baroques grimaçant sous l’effort de leur charge.

David Mach, It takes two to tango, 2011
Parvis de la tour CMA-CGM, 4 Quai d’Arenc, 2e arrondissement

Pour conclure, le sumotori d’Alexandra Gestin rejoint à Marseille deux autres jouteurs japonais : ceux du sculpteur écossais David Mach (né en 1956) de It takes two to tango, créés en 2008 et installés dans la cité phocéenne depuis 2011.


[1] Malgré la mort de son associé Henri Rivière (1965-2010), Alain Moatti (né en 1967) conserve le nom originel de son agence d’architecture.

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