Le
26 septembre dernier, la société versaillaise Chevau-Légers Enchères a vendu un
lot de deux statuettes figurant en pied l’avocat Pierre-Antoine Berryer
(1790-1868) par le sculpteur parisien Auguste Barre (1811-1896). L’une, en
bronze édité par la fonderie Susse Frères, mesure 43 cm de haut ; l’autre,
une terre cuite haute de 46 cm, est signé sur le côté A. Barre fait à Augerville… en fait, Augerville-la-Rivière
dans le Loiret, lieu de décès du grand homme. La paire était estimée 1 200
/ 1 500 €.
Ces
deux sculptures sont la réduction d’un monument érigé à Marseille. C’est donc
l’occasion de revenir sur la personnalité de Pierre-Antoine Berryer et
l’histoire de son ou plutôt de ses monuments.
Avocat
de formation, il se présente à la députation sous le règne de Louis-Philippe
dont il est un opposant. Il siège ainsi à la Chambre en tant que député des
Bouches-du-Rhône, de façon consécutive, du 21 juin 1834 au 2 décembre 1851.
Sous le Second Empire, il se retire un temps de la vie politique. Toutefois, à
la faveur de l’évolution libérale du régime qui redonne du pouvoir au Corps
législatif, il se présente comme candidat d’opposition aux élections de 1863
dans la 1ère circonscription des Bouches-du-Rhône (Marseille) ; il est élu
et demeure député jusqu’à sa mort en 1868.
Rapidement, la ville de Marseille lance une souscription pour l’érection d’une statue à la mémoire du défunt, unanimement apprécié. Le sculpteur Auguste Barre réalise son portrait en pied, en costume civil pour évoquer le député six fois élu dans le département. L’œuvre en bronze est alors exposée au Salon de la Société des artistes français de 1874 (n°2659).
L’érection du monument est autorisée par décret du 6 avril 1875. La statue est érigée au centre de la place Monthyon, sur un piédestal conçu par l’architecte départemental Joseph Letz (1837-1890). Enfin, elle est inaugurée le 25 avril 1875.
Le 11 octobre 1941, le gouvernement de Vichy décrète qu’« Il sera procédé à l’enlèvement des statues et monuments en alliage cuivreux sis dans les lieux publics et dans les locaux administratifs qui ne présente pas un intérêt artistique ou historique » (article 1) afin de pallier à la pénurie de métaux non ferreux. L’effigie de Berryer est donc envoyée à la fonte en 1942.
En
mars 1944, l’Administration générale des beaux-arts décide de remplacer la
statue fondue par une nouvelle en pierre et confie la commande à Élie-Jean
Vézien (1890-1982), directeur de l’école marseillaise des beaux-arts. Louis
Tuaillon, préfet délégué à l’administration de la ville de Marseille, valide ce
choix mais impose que le socle existant soit réemployé à cause de son « intérêt majeur ». L’artiste phocéen
se met à l’ouvrage. Il occulte l’homme politique mis en avant par son
prédécesseur et valorise l’avocat : il le représente en robe. Érigée sur
le socle dessiné par Letz – et qui indique toujours l’année 1875 –, la nouvelle
représentation de Berryer est inaugurée le dimanche 29 février 1948.
Au milieu des années 1970, le creusement du parking Monthyon et l’aménagement d’un miroir d’eau impliquent le déménagement du monument. Il quitte donc le centre de la place pour se rapprocher de la façade du palais de justice… un emplacement en retrait qui ne le valorise pas.
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